Carrot et Pressformore: un autre Flattr est-il possible?

La question de la rémunération des contenus est à mon avis une des questions clés de la création sur Internet, c’est pourquoi j’ai tendance à m’intéresser aux différentes solutions potentielles, comme Carrot et Pressformore.

Ces deux plateformes, que j’ai découvertes grâce à Ploum et à Greg. respectivement, sont assez similaires en apparence: on s’y inscrit, on y dépose de l’argent, on y consulte des contenus et, quand ça plaît, on donne une “carotte” ou un “tip” qui ira au créateur du contenu. Carrot a néanmoins ceci de particulier que le premier découvreur reçoit une partie des dons des donateurs suivants, ce qui incite à proposer du contenu original.

Pour que les créateurs puissent réclamer les fonds accordés à leurs contenus, ils doivent passer par l’introduction d’une balise en META, ce qui est grosso-modo la même méthode que Flattr, sans l’automatisation des plug-ins. Pressformore permet de le faire “par défaut” (chaque utilisateur a un identifiant unique qu’il peut ajouter sur son site), alors que sur Carrot, l’identifiant est par article, donc à peu près impossible à ajouter a priori.

Elles souffrent néanmoins de deux défauts un peu ennuyeux: d’une part, il n’y a pas beaucoup de monde dessus – encore moins que pour Flattr, c’est dire. C’est très ennuyeux, parce que la clé de la réussite de telles initiatives, c’est la “masse critique” des utilisateurs. Si ça n’intéresse qu’une poignée de libristes barbus et autres chantres de la culture alternative, ça n’ira nulle part. C’est déjà, à mon avis, le problème avec Flattr.

D’autre part, et plus ennuyeux, j’ai l’impression qu’elles essayent de réinventer la roue. En fait, Carrot et Pressformore ont un peu la même approche: proposer une plateforme de découverte et de lecture de contenu et y intégrer un système de rémunération. Je ne sais pas pour vous, mais j’ai déjà une demi-douzaine de réseaux sociaux et un lecteur de flux RSS; je n’ai pas forcément envie d’ajouter un autre site.

À la limite, si ces sites me permettaient de remplacer le lecteur de flux RSS par quelque chose d’au moins aussi efficace, en plus du système de dons, j’aurais sans doute été plus enthousiaste.

Mais Carrot, par exemple, est très limité sur ce point, n’offrant que les articles que les autres intervenants proposent. On peut assez facilement ajouter des articles au moyen d’un bookmarklet ad hoc, mais c’est tout. D’un côté, ça assure une certaine forme de curation (vu que c’est du contenu pour lequel des gens sont prêts à donner des sous), de l’autre, comme il y a peu de monde, on voit toujours un peu les mêmes trucs.

Pressformore pêche par l’excès inverse: c’est un mini-réseau social, avec commentaires et contacts, mais doté d’une interface – notamment les flux, appelés “Strews” – que je n’ai pas réussi à comprendre. Le slogan de Pressformore, c’est “le contenu que vous voulez”; dans les faits, pour moi, c’est un peu tout sauf ça. Il y a un système de catégorie et de balises, mais c’est assez abscons et, à mon avis, pas très efficace.

Et puis la tendance graphique actuelle d’avoir des “tapisseries” à base de grandes images, franchement, je ne suis pas fan. Ce d’autant plus que peu de sites prévoient le truc et mettent des images de grande taille, du coup c’est la foire au gros pixel et à l’artefact de compression agrandi douze fois.

De façon générale, je doute qu’on ait besoin d’une nouvelle façon de s’informer: on en a déjà des wagons. On a peut-être besoin d’une autre façon de donner du sens à cette information – mais ce n’est pas trop le propos – et on a certainement besoin d’une nouvelle façon de rétribuer les créateurs de contenu. Et pas seulement les pages web – les tweets, les photos, les illustrations, les vidéos, les podcasts, la musique, etc.

En l’état, ni Carrot, ni Pressformore ne m’ont convaincu. Carrot a une bonne idée avec ce “bonus du découvreur” et Pressformore, qui me paraît plus abouti, pourrait être effectivement une plateforme d’échange et de rémunération si elle s’appuyait sur des technologies déjà existantes et une interface plus claire. Ce sont des expériences sympathiques, parfois intéressantes, mais sans plus.

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4 réflexions au sujet de “Carrot et Pressformore: un autre Flattr est-il possible?”

  1. Je pense que tu as du mal configurer Carott. Tous mes billets sont automatiquement reconnus par le système, je n’ai rien à faire.

    Il ne faut pas oublier que Carrott et PFM sont des systèmes très jeune. Le premier a moins d’un an, PFM n’a que quelques mois, il est normal qu’il y ait encore peu de monde.

    Il faudra voir ce que ça donne avec le temps

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    • C’est possible que j’ai mal configuré Carrot, mais je n’ai rien trouvé comme explications sur comment le configurer correctement, ce qui est en soi un problème.

      Je veux bien laisser du temps aux sites, mais plus ça va, plus j’ai l’impression que c’est une denrée critique pour ces sites. Plus on avance dans le temps, plus la question de la “masse critique” d’utilisateurs est importante et, dans le cas de PFM, j’ai vraiment un souci avec cette approche de “remplacement, mais différent” d’une fonctionnalité – les flux RSS – que j’utilise déjà et, à mon avis, de façon plus intuitive.

      À mon avis, la clé de la réussite de tels systèmes tient dans une barrière d’entrée la plus basse possible et je ne vois ça, ni dans Carrot, ni dans Pressformore.

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  2. Un problème, à mon avis, c’est que ces systèmes essayent de régler deux problèmes séparés: a) l’attribution, b) la rétribution.
    Pour moi les deux problèmes devraient être réglés par deux services différents avec des objectifs très différents chaque service d’attribution demande que je bricole mon contenu et marche de manière différente pour chaque plateforme où je publie.
    Je préfèrerais utiliser un service d’attribution solide, comme keybase, et que le service de rétribution se content de faire l’association don – contenu. Le support des plateformes de contenus est à mon sens capital, vu que les sites web sous le contrôle des auteurs sont probablement une espèce en voie de disparition.

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  3. Tu as bien résumé le problème de ses sites: atteindre une masse critique. Le buzz de flatter n’a pas suffi. Pas sûr que ces deux là fassent mieux avec déjà un an de vie.
    Et puis surtout, ça ne fera pas sortir de cette dépendance aux réseaux sociaux dans laquelle nous sommes tombés

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