Negură Bunget: Vîrstele Pămîntului

Vous allez finir par croire que je fais une fixation sur les groupes de métal abscons de provenance exotique et la vérité n’est sans doute pas très loin: Negură Bunget est un groupe qui m’a sérieusement tapé dans l’oreille et leur dernier album studio en date, Vîrstele Pămîntului, est dans la continuité de Om, précédemment chroniqué ici même.

Alors certes, on pourra chouiner – comme beaucoup de chroniqueurs – sur le fait que la surprise est passée et que Vîrstele Pămîntului n’est pas le chef-d’œuvre qu’est Om. “On” pourra; moi pas: à mon avis, cet album confirme autant qu’il affirme le style de Negură Bunget, ce mélange entre un pagan-folk sombre et un black métal brutal, le tout entrecoupé d’ambiances planantes lumineuses, à l’image d’une promenade dans la “forêt brumeuse”, traduction littérale du nom du groupe.

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Obiymy Doschu: Elehia

Retenez-bien ce nom: Obiymy Doschu. Je sais, ce n’est pas facile, mais si Elehia, premier album de ces Ukrainiens, est une indication, ça risque d’être une des très grosses surprises de 2011! Décidément, après Negură Bunget hier ou Kauan et Moon of Soul il y a quelques temps (sans même parler de Fromuz), les pays de l’est recèlent des trésors mieux cachés que celui des Templiers (et plus réels, aussi).

La musique de Obiymy Doschu se situe entre le rock progressif, le métal atmosphérique et le folk slave, ce qui déjà en soi n’est pas banal; on ne peut pas dire que ce carrefour soit très densément peuplé. De plus, pour se faire connaître, le groupe a choisi de mettre son album à disposition gratuitement sous licence Creative Commons (on peut aussi acheter leur CD), en téléchargement et à l’écoute (aussi sur Jamendo).

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Negură Bunget: Om

Cela fait un petit moment qu’on me parle des Roumains de Negură Bunget. Déjà à cause de mon amour immodéré pour les découvertes musicales absconses venus de pays improbables et ensuite parce qu’il faut bien avouer que, ces derniers temps, j’ai pas mal tapé dans le death/black metal et que ça a fini par se voir. Sur la recommandation de beaucoup de gens, notamment le désormais habitué de ce blog Sabat, j’ai acquis l’album Om, paru en 2007, et je dois avouer que, pour de l’abscons, c’est de l’abscons.

Parce que non content de faire du black métal roumain, ce qui déjà en soi est assez original, Negură Bunget ajoute à ce style une approche folk et ambiante qui, par certains côtés, rappelle un peu Alcest et, par d’autres, plutôt le style plus brutal d’un Rotting Christ. On peut écouter quelques extraits sur le site ReverbNation de Negură Bunget, histoire de se faire une idée (encore que les extraits qui y sont semblent concerner des albums plus récents).

Pour ce qui est de Om, c’est un album très surprenant, qui alterne des morceaux courts et lents, brutaux (“Dedesuptul”) et planants, avec d’extraordinaires moments de grâce (“Primul Om”, “Cunoasterea Tacuta” et “Inarborat”, s’il ne fallait que citer ceux-là), des sonorités que l’on serait bien en peine d’attribuer à un genre ou à un autre. C’est très, mais alors très riche et, encore plus surprenant, très homogène.

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This Will Destroy You: Tunnel Blanket

Et c’est le groupe de post-rock This Will Destroy You qui gagne le “ou pas” du jour! Parce que franchement, leur dernier album Tunnel Blanket ne tue pas grand-chose. Oh, ce n’est pas qu’il est mauvais: dans son genre, à base d’ambiances plomblées, de morceaux instrumentaux lents et de saturation en pagaille, il est même plutôt bien. C’est juste que, quand un groupe – surtout texan – a un nom pareil, je m’attends à quelque chose de plus immédiatement brutal.

Si on prend comme exemple “Little Smoke”, premier des huit morceaux de l’album, on est bien en peine de trouver quelque incitation à remuer quoi que ce soit: début presque imperceptible, montée en puissance sur près de la moitié des douze minutes et final où on ne sait plus si c’est de la guitare saturée ou du hurlement. La destruction est là, mais elle se fait à petit feu. Le suivant, “Glass Realms” est encore plus zen, composé uniquement de plages planantes sur près de sept minutes.

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Presto Ballet: Invisible Places

Le plus dur, en chroniquant Invisible Places, dernier album en date de Presto Ballet, a été d’éviter de faire une blague de LOLcat. La deuxième la chose la plus dure a été de trouver quoi dire de pas trop positif, mais pas trop négatif non plus sur cet album qui donne dans une variante de rétroprogressif s’inspirant plus de “l’école américaine” du prog des années 1970.

Entendons-nous bien: j’aime beaucoup Kansas et, à un moment donné, je ne détestais pas Styx (même si, depuis, je trouve que ça a mal vieilli); donc, quelque part, qu’un groupe s’inspire de ces exemples plutôt que d’aller pomper pour la énième fois Yes, Genesis, Pink Floyd ou Marillion, c’est plutôt un bien pour un mal. Le problème est qu’à trop vouloir donner dans ce style, Presto Ballet tombe dans les mêmes travers et propose une musique qui est plus “classic rock” que rock progressif.

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Anekdoten: A Time of Day

Il n’est jamais trop tard pour découvrir les références d’un genre qu’on croyait pourtant connaître par cœur: Anekdoten, groupe de rock progressif suédois actif entre la fin des années 1990 et le début des années 2000, est considéré comme tel et pourtant, A Time of Day, qui date de 2007 et est leur dernier album en date, est le premier que je m’hasarde à écouter (sur la recommandation de Sabat ici-même).

Si les critiques le décrivent comme un groupe fortement inspiré par le prog des années 1970 et notamment King Crimson, mais avec une interprétation nettement plus moderne, je ne peux pas m’empêcher d’y trouver des accents à la Porcupine Tree et même post-rock (dans le court instrumental “Every Step I Take”), à tel point que je me demande si je ne tiens pas là le chaînon manquant entre prog et post, qui expliquerait que ces deux genres musicaux pourtant assez différents se retrouvent aussi proches.

De façon générale, la musique d’Anekdoten est un rock progressif plutôt plombé, aux ambiances sombres parcourues de nappes du fameux Mellotron, instrument fétiche des fans de prog (et cauchemar des musiciens, si on en croit les témoignages recueillis dans le dossier du numéro 63 de Prog-résiste). Tout cela est plutôt bien foutu, avec un mélange d’ancien et de moderne dont devrait s’inspirer beaucoup plus de groupes contemporains du courant rétroprogressif. Seuls les vocaux, par moment tellement désaccordés que je me demande si ce n’est pas fait exprès, sont agaçants.

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Yes: Fly From Here

Dans la blogosphère prog, l’arrivée de Fly From Here, le nouvel album de Yes (dix ans après le précédent), est comparable à l’annonce d’un huitième volume d’Harry Potter ou du rachat d’Apple par Microsoft (ou vice versa). D’une part, ça fait beaucoup de bruit et, d’autre part, ça donne lieu à un déchaînement de passions, surtout négatives.

Il faut dire que, dans le genre controversé, celui-ci est pas mal. Déjà, le chanteur historique et iconique, Jon Anderson, est remplacé par Benoît David, un p’tit jeune (il a juste un an de plus que moi); en plus, cet album signe le retour de Geoffrey Downes aux claviers et Trevor Horn à la production. Pour ceux qui ne connaissent pas les deux oiseaux, les Buggles, c’est eux – et Drama, album de Yes de 1980 honni par les fans, c’est eux aussi. En fait, du groupe “historique”, il ne reste que Steve Howe aux guitares.

Autant dire que cet album a déjà généré pas mal de hurlements et va sans doute continuer à brasser du fanboy pendant un moment. N’étant pas moi-même un fan absolu du groupe et, surtout, étant plutôt fan des Buggles, je ne vais pas ajouter ma voix au concert – ou alors, sur un mode de contrepoint discordant qui, quand on y pense, est assez prog. Ou pas.

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Mars Hollow: World in Front of Me

Je pourrais m’inspirer du caillou qui figure sur la pochette de World in Front of Me et faire une chronique lapidaire de ce nouvel album de Mars Hollow en vous renvoyant à celle du précédent album. Ce serait un peu gratifiant quelque part, mais également un peu injuste.

Certes, les Californiens reviennent avec à peu près la même formule, à savoir un rock progressif vintage inspiré notamment par Emerson, Lake and Palmer. Même le son est à peu près d’époque; visiblement, les méthodes de production moderne, ce n’est pas pour eux! Je pourrais même pousser la méchanceté en affirmant que la pochette, d’un style très années 1980, est la seule concession à la modernité de tout l’album.

Certes, “Walk On Alone” attaque en déroulant sur plus de douze minutes ce rétro-prog qui, en poussant un peu, rappelle Cairo, les claviers en folie en moins. Cependant, les choses s’arrangent un peu par la suite et, si le ton général reste très typé années 1970, on sent poindre quelques touches d’originalité et de modernité par la suite. Oh, rien de transcendant, mais au moins quelque chose qui pousse cet album un cran au-dessus du précédent.

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Tides From Nebula: Earthshine

Pour ceux qui doutaient encore que la Pologne est en train de devenir une grande nation du prog, du métal et de musiques assimilées (= que j’écoute), je vous présente Earthshine, dernier album en date de Tides From Nebula.

Bon, question originalité, on est loin de Riverside ou d’Indukti et ce joyeux quatuor en -ski nous sert un post-rock instrumental à la forte inspiration God Is An Astronaut: des morceaux plutôt lents et longs, des ambiances stellaires qui accompagneraient parfaitement des images du télescope Hubble ou des voyages en train le long du Transsibérien.

Cela dit, en amateur du genre, je ne me plains pas; OK, pas beaucoup, en tous cas. La musique de Tides From Nebula possède toutes les qualités de son glorieux modèle irlandais et, si on peut légitimement lui reprocher un manque certain d’originalité (ainsi qu’un léger manque de nefs), l’exécution est irréprochable. “The Fall of Leviathan”, écoutable sur le lien MySpace ci-dessus, est un morceau de très haute tenue.

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Stream of Passion: Darker Days

Ça fait un petit moment que le nouvel album de Stream of Passion, Darker Days, traîne sur ma playlist. Je dois avouer que je continue d’acheter les albums de ce groupe plus par habitude que par réel intérêt: Stream of Passion est né comme un side-project d’Arjen Anthony Lucassen (Ayreon) et donne dans un métal à chanteuse plus “à chanteuse” que réellement métal.

Qu’on ne s’y trompe pas: la chanteuse mexicaine Marcela Bovio a une très belle voix, qui n’est pas sans rappeler Anneke van Giersbergen, mais pour le reste, passé le premier album et la “patte” Lucassen, Stream of Passion a plus donné dans le métal symphonique plan-plan, voire quelque peu mou du genou, que dans l’enthousiasmant. Bonne nouvelle néanmoins, ce troisième album semble s’orienter vers quelque chose d’un peu plus recherché et intéressant.

En fait, en plus de la voix, pas mal d’éléments musicaux de ce Darker Days font penser à The Gathering. Bon, hélas, pas celui des périodes les plus intéressantes, mais quand même. Par exemple, le morceau-titre est plutôt enlevé (ce qui est un peu une exception dans un album dominé par les morceaux lents ou mid-tempo) et tient bien la route. Cela dit, il n’y a rien dans cet album qui ressorte particulièrement; son écoute est plaisante, mais pas transcendante non plus.

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Haken / Vanden Plas / RPWL / iQ / Dream Theater / Anathema au festival Night of the Prog VI

Cet article est le numéro 3 d'une série de 3 intitulée Lorelei 2011

Deuxième journée du Night of the Prog Festival, le 9 juillet 2011: des remplaçants de luxe, des p’tits jeunes qui boîtent, des vieux de la vieille et des Belges en folie.

Night of the Prog VI, Lorelei

C’est rien de dire que d’aller de Genève à la riante métropole de Sankt Goarshausen, non loin du site de la Lorelei, est une expédition : trois changements de train, plus de huit heures de trajet. Rien que du bonheur ! Surtout quand il y a deux ICE qui partent de Bâle vers Frankfurt à dix minutes de distance, que leurs numéros ne sont pas indiqués et qu’on prend le mauvais. Qui ne va pas à Frankfurt Hauptbahnhof, mais à Frankfurt Flughafen et que, suite à des portes bloquées, on rate la correspondance. Rien que du bonheur, je vous dis.

Bref, du coup, on est arrivé en retard. Mais une fois sur place, le site de ce sixième Night of the Prog Festival est juste magnifique : une sorte de vaste amphithéâtre bénéficiant d’une bonne acoustique. Les seuls soucis sonores sont des basses un peu trop enthousiastes et des claviers qui peinent à être entendus dès qu’il ne sont plus tous seuls à jouer. À la vérité, je soupçonne que c’est en grande partie dû à notre choix de FBDM : tout devant, contre la rambarde – et donc à douze centimètres des caissons de basse. La fan-attitude, ça s’assume.

Un des gros défauts du site est qu’il n’existe qu’un seul coin toilettes, ce qui n’est pas toujours évident à gérer après un nombre pas forcément raisonnable de bières. Le site n’a également que deux stands de nourriture, proposant un régime à base de viande (steak ou saucisses) et de frites ; les végétariens n’ont plus qu’à brouter la pelouse, merci pour eux.

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Martigan / Sky Architect / Threshold / Riverside / Eloy au festival Night of the Prog VI

Cet article est le numéro 2 d'une série de 3 intitulée Lorelei 2011

Première journée du Night of the Prog Festival, le 8 juillet 2011. On commence par des revenants, des jeunots doués, des grands noms de la nouvelle et de l’ancienne génération.

Altar of Plagues: Mammal

La saison étant au post-black metal, je ne résiste pas à l’envie de vous en remettre une couche – juste avant de partir pour la Lorelei – avec Mammal, le dernier album d’Altar of Plagues. Je vous avais déjà parlé de ce groupe irlandais avec leur précédent opus, White Tomb, Mammal remet ça dans le domaine de la bande-son torturée pour fin de civilisation en gommant certains des gros défauts, mais en en rajoutant d’autres.

Posons déjà les choses: Mammal, c’est en tout et pour tout quatre morceaux. Alors certes, ça fait en tout cinquante minutes et ça commence par un “Neptune Is Dead” de plus de dix-huit minutes, juste histoire de dire. Un instant, on craint que les choses repartent comme précédemment, mais les vocaux horripilants de White Tomb se font moins pressants, plus maîtrisés peut-être – ou alors c’est moi qui m’habitue.

Si le suivant, “Feather and Bones” est pour moi le meilleur morceau de l’album, j’ai beaucoup plus de mal avec les sonorités ethno-tribales (qui s’avère être un chant funèbre irlandais) de “When the Sun Drowns in the Ocean”, qui heureusement est le morceau le plus court de Mammal (huit minutes, quand même). “All Life Converges To Some Center” conclut l’album dans un style plus en ligne avec les deux premiers morceaux.

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Devin Townsend Project: Deconstruction / Ghost

Accrochez-vous à vos bretelles et préparez vos métaphores sur Janus ou Dr Jekyll et Mr Hyde: Devin Townsend, multi-instrumentiste canadien fou furieux, est de retour avec non pas un, mais deux albums: le surexcité Deconstruction et le sérénissime Ghost. Dans le genre contraste total, il est difficile de faire plus brutal! C’est un peu comme si Mike Oldfield et Rammstein décidaient de faire deux albums vendus ensemble.

Si Ghost est un album paisible, mélodique et éthéré, Deconstruction est une plongée dans un métal plus expérimental et chaotique que réellement progressif, un concept-album délirant sur la descente en Enfer d’un homme qui cherche le sens de la vie (qui se trouve être dans un cheeseburger, juste pour vous donner une idée du niveau). Et autant dire que Devin Townsend, avec son expérience de Strapping Young Lad (groupe inécoutable, même pour moi), a du répondant quand on parle de chaos.

Ce genre de montagnes russes, il faut le vivre pour y croire. C’est un peu un croisement entre Unexpect et Diablo Swing Orchestra, avec de l’ADN de Danny Elfmann et de death-metal (pour les hurlements), le tout sur des morceaux qui peuvent atteindre et même dépasser les dix minutes. Pourtant, ça commence tranquilou avec l’intro de “Praised the Lowered”, mais c’est un piège: dès la moitié du morceau, ça commence déjà à partir en vrille et, si le début de “Stand” est lui aussi gentillet, il ne lui faut pas trois minutes pour attaquer sec.

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Fen: Epoch

C’est l’été, le soleil, la chaleur, les longues journées; l’époque idéale pour écouter du post-black métal. Euh, non, peut-être pas, en fait, mais ce n’est pas ça qui va m’empêcher de vous parler d’Epoch, dernier album de Fen – si l’on excepte le “split” avec De Arma dont je vous avais parlé précédemment.

Le post-black métal est un genre somme toute assez récent, qui a atteint une certaine popularité avec des groupes comme Alcest ou Altar of Plagues; c’est du black métal, mais intégré dans le creuset du post-rock ou post-métal, avec des compositions souvent longues, complexes, faites de mélodies mélancholiques sur fond d’un mur de guitares ultra-saturées et surlignés par des nappes claviers ou des violons.

Donc, Fen, c’est ça: huit morceaux entre six minutes et dix minutes, des ambiances tantôt planantes, tantôt plombées, le plus souvent les deux, des hurlements typiques de black métaleux et des moments de grâce comme autant de rayons de soleils fugaces au milieu d’une tempête de fin du monde. La musique de Fen s’apparente souvent à une sorte de maelström de chaos primordial, mais il ne faut pas s’y tromper: elle obéit à ses propres lois et porte en elle sa propre beauté – parfois un peu malsaine, mais baste!

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