“Cleer”, de L.L. Kloetzer

Cleer, c’est une marque, une entreprise, une philosophie, “Be yourself”; une secte, peut-être. Cleer, c’est un roman de Laurent “L.L.” Kloetzer qui plonge dans cet étrange univers, aux confins du cyberpunk et du fantastique, avec un fond d’enquête-aventure et un soupçon de Dilbert.

Vinh Tran et Charlotte Audiberti sont employés dans la division Cohésion Interne du groupe, enquêtant sur les problèmes que les méthodes du groupe ne peuvent gérer normalement. Des problèmes nés le plus souvent des pôles de recherche avancés du groupe: biotechnologie, sciences cognitives, génétique et consorts.

Tellement avancées que, parfois, la trame même de la réalité semble partir en live, avec hallucinations, intuitions extra-sensorielles, voire changements physiques et physiologiques. C’est une des grandes forces de Cleer: un contexte noyé dans la lumière – symbole du groupe – et le jargon corporatif, une sorte de champ de distorsion de la réalité permanent.

C’est aussi une narration qui emporte le lecteur sur des frontières sensorielles, jonglant entre conversations, correspondances, conférences et conciliabules, pensées intimes et déclarations publiques – parfois entremêlés au point d’entretenir la confusion, mais on peut croire que c’est le but.

Situé dans un futur si proche qu’on en sentirait presque le goût, Cleer montre le côté autiste et schizophrène des grandes corporations: les illusions de pureté et d’éthique qui dégénèrent en guerres d’ego et en gestion d’image, l’encadrement mental des employés à la limite du lavage de cerveau (et pas toujours du bon côté de la limite), les slogans, le jargon.

C’est un roman déroutant dans sa forme et passionnant dans son contenu, même si ce qui n’y est pas dit est peut-être plus important que ce qui est raconté – au final une histoire en miroir de chute et d’ascension. Pour les rôlistes qui cherchent à donner une consistance inédite à leurs corpos cyberpunk (ou même contemporaines), c’est une lecture presque indispensable.

Pour ma part, je sors assez soufflé de cette lecture; j’ai eu du mal à lâcher le bouquin. J’ai presque été déçu de l’absence d’explications rationnelles à la fin, mais, à mon avis, c’est parce qu’il ne peut pas y en avoir dans un univers que l’auteur décrit comme “à mi-chemin entre David Lynch et l’Ancien Testament”.

Lisez Cleer, “be yourself”!

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4 réflexions au sujet de ““Cleer”, de L.L. Kloetzer”

    • Oui, c’est vrai, même si ça ne m’avait pas particulièrement marqué sur le moment. Il est vrai aussi que j’ai très peu joué à Paranoïa.

      Et merci pour le petit mot, m’sieur l’auteur. Peut-être à tout à l’heure à Bagneux?

      Répondre

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