“Des Monts célestes aux sables rouges”, d’Ella Maillart

En 1932, Ella Maillart, jeune Suissesse assoiffée de grands espaces, parcourt l’Orient soviétique: Kazakhstan, Ouzbékistan, Kirghizistan; elle écrit plus tard son récit de voyage, Des Monts célestes aux sables rouges. Un voyage dans les “marches” d’un empire d’un nouveau genre, tourné vers le progrès et la raison (officiellement, tout au moins), mais aussi dans les marches du XXe siècle, vers des modes de vie nomades qui remontent à des temps immémoriaux

Autant vous prévenir une fois de plus: comme annoncé dans mon billet sur L’échappée belle, du Ella Maillart, je vais en bouffer – et vous aussi, du coup! Si celui-ci est chronologiquement le deuxième, j’ai commencé par lui parce que le premier, Parmi la jeunesse russe, est épuisé. Mais à mon avis, pour se faire un idée de la vie d’exploratrice de la narratrice, il est probablement plus pertinent que ses activités sportives avec les jeunesses moscovites.

Et tant qu’on y est dans les avertissements, Ella Maillart n’est pas Nicolas Bouvier, même si elle a eu sans nul doute une grande influence sur ce dernier. Ses péripéties se déroulent, d’une part, vingt à vingt-cinq ans auparavant – autant dire un autre siècle, au vu de la cassure qu’a créé la Seconde Guerre mondiale.

Cela se ressent dans le style, mais aussi dans le contexte. L’administration soviétique est partout présente – Guépéou, Gosplan, tickets de rationnement et autres fermes d’État – et on sent poindre une légère admiration pour ce régime dans les descriptions d’Ella Maillart (même si elle s’en défend).

Le style, donc, est également très différent: plus sec, plus descriptif, parfois difficile à saisir car truffé de termes russes ou autochtones. L’écriture d’Ella Maillart est ici à mi-chemin entre celle d’une journaliste, d’une anthropologue et d’une voyageuse ingénue.

J’ai également l’impression que, plus que Bouvier qui s’intéresse surtout aux peuples, elle donne beaucoup la parole aux personnes. Ainsi qu’aux paysages: cols enneigés, déserts de sable, villes de légende (notamment Samarcande), tous ces lieux prennent vie.

Au final, si je suis moins enthousiaste qu’à la sortie de L’usage du monde, la lecture de Des Monts célestes aux sables rouges m’a tout de même passionné. C’est du pur dépaysement et une plongée dans un univers humain encore plus étranger que pouvaient l’être les rencontres de Nicolas Bouvier et Thierry Vernet sur la route de l’Afghanistan.

Bien évidemment, pour toute personne intéressée par la période de l’avant-guerre – au hasard, un rôliste qui veut jouer pulp avec une petite dose de vraisemblance, ou qui s’intéresse aux peuples nomades – il y a dans les pages de ce bouquin une mine d’anecdotes, de légendes et d’idées pour des aventures inoubliables entre Caucase et Himalaya.

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