Le Front national expliqué à mon père

En ces temps où l’extrémisme est tellement tendance que, pour un peu, il passerait au Top 50, il est toujours bon de lui jeter un œil critique. D’abord, parce que c’est plus civilisé qu’un parpaing (même si je peux comprendre que le parpaing ait un effet cathartique) et, ensuite, parce que souvent, l’extrémisme est une forme de vampire qui se complaît dans l’ombre et auquel la lumière nuit.

Tout ceci pour vous dire que j’ai donc acheté ce nouvel hors-série de Charlie-hebdo, intitulé Le Front national expliqué à mon père. Le clin d’œil du titre à l’actuelle dirigeante du FN et à son fort encombrant papa est assez transparente, mais il contient aussi une allusion au fait que ce parti n’est plus aujourd’hui ce qu’il était du temps de nos géniteurs.

C’est le plus gros du contenu de cet hors-série: il décortique l’histoire et l’évolution du parti, de ses débuts groupusculaires à son actuelle ascension médiatique et idéologique. Comme le dit l’introduction à l’une des sections, on parle beaucoup du FN, mais sans le regarder vraiment et un examen approfondi a beaucoup à nous apprendre.

Notamment sur le fait, que si le parti a effectivement changé dans sa communication et ses méthodes – par exemple en oubliant habilement le pan ultra-libéral de son programme économique pour mieux se rapprocher des couches populaires en apparaissant comme le défenseur des plus faibles – il reste un parti dont l’encadrement est à la limite de l’amateurisme et parcouru par pas mal de divisions.

Les articles reviennent souvent sur l’indiscipline notoire des troupes, ce qui explique beaucoup les “dérapages” des élus et des candidats, qui se lâchent en ligne ou devant témoins en propos réellement nauséabonds. Il n’empêche, le FN occupe ce terrain mieux que beaucoup d’autres partis et sait en tirer avantage.

Le paradoxe est là: en apparence, le Front national est un parti en ordre de marche, qui dicte ses thèmes à la droite traditionnelle et tisse des passerelles qui brouillent les frontières (un comble pour un parti xénophobe!), mais dans les faits, il reste un parti très jeune, avec une direction qui contrôle mal des troupes un peu trop enthousiastes.

J’ai regretté qu’au-delà de l’analyse historique et politique, fort intéressante, la publication ne s’intéresse pas plus aux stratégies potentielles pour reprendre le terrain abandonné au FN. Un peu comme dans À bas la pub!, j’ai l’impression qu’il manque un truc en plus. J’aurais aimé que ce Front national expliqué à mon père soit plus à l’image de L’UDC en 7 leçons de Vigousse.

Bon, cela reste de la très bonne information, très intéressante quand même (quand on fait abstraction des dessins, qui sont parfois drôles, mais le plus souvent bien moins subtils que le propos du texte), mais c’est un peu frustrant. Mais que cela ne vous empêche pas de l’acheter: pour une fois, je vous en parle alors qu’il est encore disponible en kiosque. Pour six euros, c’est un travail d’analyse et de démystification vaut le coup.

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