« Le Cinquième Principe », de Vittorio Catani

Quelque part au milieu du XXIe siècle. Les riches sont devenus ultra riches, les pauvres ultra pauvres, tout le monde a une PEM, un ordinateur directement connecté au cerveau et des événements bizarres commencent à apparaître, remettant en cause les principes même de la physique. C’est le point de départ du roman de Vittorio Catani, Le Cinquième Principe.

Ceux qui suivent ce blog depuis un moment savent que mon principe éditorial premier, sinon unique, c’est d’y parler de choses que j’aime bien. Il y a des exceptions et cet ouvrage en est une. J’aurais aimé aimer Le Cinquième Principe, mais je n’y suis pas arrivé.

Il faut dire qu’il m’a été recommandé par Gromovar, auquel j’ai tendance à faire confiance, d’autant qu’il semblait toucher à plein de sujets qui m’intéressent: informatique, cyberpunk, questions sociales, etc.

On y suit un groupe de scientifiques abandonnés par les institutions étatiques qui ont revendu les universités à la découpe, un scientifique qui a fui ses anciens maîtres en remplaçant sa mémoire par celle d’un prolétaire du New York underground, un ultramilliardaire qui rêve de faire main basse sur les eaux de l’Antarctique, des utopistes, des révolutionnaires, des jet-setteurs, des Bretons…

Pas de ratons-laveurs; si ça se trouve, ils sont tous morts, détruits avec leur écosystème par un ultracapitalisme paroxystique.

C’est un des problèmes du Cinquième Principe: roman choral, certes, mais avec tellement d’intervenants que ça ne peut que virer à la cacophonie. À mon avis, il y a au moins un tiers des protagonistes qui ne servent à rien, voire qui desservent le propos.

Le milliardaire, par exemple, ne sert qu’à montrer la démesure de Diaspar, la cité des « un pour cent » (littéralement: elle accueille 90 millions d’habitants sur les onze milliards que compte alors la planète). Et j’ai même eu l’impression qu’il était une excuse pour des scènes d’exposition à la limite de l’ignoble.

Un autre problème m’est apparu en lisant un tweet récent de Neil Jomunsi, qui disait en substance qu’à l’heure actuelle, empiler les éléments « magiques » est une mauvaise idée.

Dans Le Cinquième Principe, Vittorio Catani rajoute à sa dystopie tout une couche « d’Événements Exceptionnels » qui, honnêtement, n’apportent rien de convaincant à l’histoire. Et, pour ne rien arranger, il en rajoute un troisième – dont je ne parlerai pas ici pour ne pas divulgâcher – qui n’apparaît que dans le dernier tiers du bouquin.

Peut-être que ces trois éléments sont liés, mais très honnêtement, je ne l’ai pas vu. J’avoue aussi qu’à partir d’un moment, j’ai commencé à lire le bouquin en diagonale. Il est aussi long, très long, même. Et pas mal verbeux, aussi.

Si je suis aussi négatif, c’est parce que ça me vexe un peu. J’ai l’impression d’être complètement passé à côté du bouquin et je ne vois pas où ça a pu merder.

C’est dommage, parce que le roman a tout de même des qualités. Toute la partie au début, qui montre le caractère pernicieux des PEM, est plutôt bien vu. L’objet est encore plus ubiquitaire que les téléphones portables de nos jours, mais sa liaison directe avec le cerveau des utilisateurs en fait le vecteur idéal pour la manipulation mentale – au service de la paix sociale ou du consumérisme.

Tous les éléments sociaux, qui montrent une société privatisée à l’extrême, où les dernières parcelles régaliennes se drapent dans un apparat aussi ridicule que pathétique, sont aussi mordants. Mais ces deux éléments tendent à disparaître dès la deuxième moitié de l’ouvrage.

Sur le papier (façon de parler), Le Cinquième Principe aurait dû me plaire. Mais dans les faits, j’ai eu l’impression de lire quelque chose de daté – certes, il a été écrit il y a douze ans, mais quand même! – et de beaucoup trop bordélique. Il est possible qu’il ait aussi du mal à tenir la comparaison avec certaines de mes lectures récentes, comme Tomorrow and Tomorrow ou Stealing Worlds, sans parler de Walkaway.

Au final, je ne peux honnêtement pas vous recommander Le Cinquième Principe. J’ai aussi du mal à ne pas vous le recommander, vu que Gromovar et Juste un mot en disent le plus grand bien. Je ne peux que dire que je ne l’ai pas aimé.

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2 réflexions au sujet de “« Le Cinquième Principe », de Vittorio Catani”

  1. Bonjour,

    Je n’ai pas lu le cinquième principe, mais pour voir les conséquences d’un monde privatisé à l’extrême, les Furtifs de Damasio est top!

    Répondre
    • Hello et bienvenue!

      Je dois avouer avoir une préconception défavorable sur les bouquins de Damasio – préconception qui, je l’admets, est basée sur la lecture d’exactement un bouquin (La Horde du Contrevent). Du coup, je ne suis pas très enthousiaste à l’idée de lire Les Furtifs.

      Répondre

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