Barði Jóhannsson: Selected Film and Theater Works

Ce n’est pas la première fois que ça m’arrive, mais Selected Film and Theater Works de Barði Jóhannsson est arrivé plus ou moins tout chaud dans ma boîte à emails cette semaine (modulo les balises d’identification des MP3, qui étaient aux fraises). Ça surprend, mais ça fait toujours plaisir – ce d’autant plus que le service presse avait fait son boulot et jeté un peu plus qu’un rapide coup d’œil à mon blog.

Du coup, la musique du ci-devant Barði Jóhannsson, citoyen islandais m’est plutôt agréable, ce qui – je rassure mes fans (les deux qui reste) – est la raison qui motive cette brève chronique et non un quelconque intéressement financier (le contact de la maison de disque n’ayant même pas fait usage du bouton Flattr, c’est dire!).

Donc, Barði Jóhannsson. L’album est, comme son nom l’indique, une compilation qui propose pas moins de dix-huit morceaux extraits de ses musiques pour films, documentaires, pièces de théâtre – principalement les pièces de théâtre Museum of the Sea et Hedda Gabbler, qui forment plus de la moitié de l’album. Ce sont des compositions instrumentales calmes, souvent minimalistes, interprétées principalement au piano et violon (et rarement plus); elles sont plutôt courtes: aucune ne dépasse les cinq minutes et c’est plutôt entre une et deux.

Je ne connais pas la plupart des films mentionnés ici, mais j’ai dans l’idée que ce ne sont pas des thrillers d’action signés Michael Bay; l’exception est Häxan, mais d’une part il s’agit d’un film de 1922 et, d’autre part, la version que j’ai vue devait avoir la musique de Daniel Humair. Pour rester dans les comparaisons islandaises, on est carrément plus proche de Sigur Rós que du “Army of Me” de Björk. Ou de certains vieux albums de Mike Oldfield (mais c’est moins islandais).

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Heretoir

Dans notre série “le black métal mène à tout à condition d’en sortir”, le groupe allemand Heretoir vient de sortir un album éponyme qui navigue dans les mêmes eaux ambiantes et mélodiques que des groupes tels qu’Alcest ou Les Discrets. Ce qui signifie que, techniquement, ils n’en sont pas vraiment sortis – du black métal, donc – même s’il s’agit d’une musique qui cherche plus les atmosphères tourmentées que les avalanches de guitares.

Rassurez-vous, il y en a encore et il ne faut pas attendre très longtemps pour les entendre: dès “Fatigue”, le deuxième morceau de l’album, on sent l’héritage qui remonte, entre le mur de guitares (qui rappelle un peu les productions post-métal) et les hurlements torturés qui se superposent aux vocaux en clair. C’est brutal, mais c’est beau; si Heretoir veut nous raconter une histoire, je doute qu’elle contienne beaucoup de licornes et d’arcs-en-ciel. Ou alors des licornes mortes. Ou mort-vivantes. Enfin bon.

Au reste, il y a énormément de variété dans cette album – variété dans le sens “différents styles musicaux”, bien sûr. Au très métal “Fatigue” succède un “Retreat to Hibernate” qui commence acoustique avant d’être rejoint par les guitares électriques, tout en restant très mélodique, puis par le très court “0” qui contient une collision d’ambiances sonores faites de sons divers et d’extraits de dialogues, avant de retourner dans le métal avec “Weltschmerz”.

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Fen & De Arma: Towards the Shores of the End

Je me suis fait avoir. Au départ, c’est le dernier album de Fen que je voulais acheter; trompé par la pochette, à peu près identique, j’ai pris ce split de Fen et De Arma, intitulé Towards the Shores of the End. Bon, j’aimerais bien que toutes mes erreurs se révèlent aussi positives que celle-là, car dans le genre black métal atmosphérique aux tendances post-rock, l’album est des plus agréables et contient quelques gemmes – forcément noires.

Fen est un groupe britannique, De Arma est suédois et, sur cet album, les deux groupes se succèdent dans une continuité de style qui rend difficile de savoir qui est qui. Pour la cohérence de l’album, c’est une bonne chose, pour l’originalité, je suis moins sûr. La musique n’est pas sans rappeler d’autres groupes du genre, comme Alcest ou Les Discrets, un métal plus porté sur les ambiances que sur les envolées nerveuses, même si ces dernières ne sont pas oubliées, comme le prouve “Soilbound” en intro.

À une exception près (l’instrumental acoustique “Bereft”), les sept morceaux tissent leurs ambiances sur six à neuf minutes; à ce rythme, les deux groupes ont le temps de poser des compositions complexes, souvent remarquables, où chants en clair et hurlements semi-hystériques alternent. Voir le morceau-titre, “Towards the Shores of the End”, un des meilleurs de l’album avec “Crimson Waters Ebbing the Shore” et “Noemata”.

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Maserati: Pyramid of the Sun

J’ai un peu honte: je n’ai appris l’existence de Pyramid of the Sun, dernier album en date des Américains de Maserati, par un des moyens les plus détournés qui soit: un compte-rendu de concert dans Charlie-hebdo, qui plus est d’un concert à Lausanne. Ce qui me met vraiment la honte, c’est que je considère Maserati comme étant un des meilleurs groupes de post-rock, notamment via leur album Inventions for a New Season, sorti en 2007. Avoir pu perdre ce groupe de vue à ce point, c’est pas très flatteur pour ma réputation…

Je pourrais prétendre qu’ayant appris la mort de Jerry Fuchs, batteur et âme du groupe, j’avais présumé le groupe disparu avec lui, mais la vérité est que j’ai simplement zappé. Je me ferais bien hara-kiri avec un MP3 émoussé, mais c’est contre mes principes (en plus du fait que, du temps que je passe à travers la graisse, je suis encore là demain). Ma repentance consistera en vous parler de ce nouvel album, paru donc fin 2010 (ça va, je n’ai donc pas trop de retard) et qui est un autre remarquable exemple du style particulier de post-rock propre à Maserati.

On y retrouve les textures de guitares tissant des ambiances complexes et plombées sur des morceaux parfois très longs (jusqu’à huit minutes et plus), appuyés par une rythmique ultraprésente, une sorte de métronome qui appuie les mélodies et dont le groupe sait jouer pour ménager des pauses dans les compositions. Plus généralement, la musique de Maserati se distingue souvent par une dynamique propre et très communicative: on sent vraiment le côté road-movie, principalement alimenté par la rythmique, mais également par un sens de l’énergie dirigée vers un but commun. Maserati va quelque part et a une assez bonne idée d’où.

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Mastodon: Live at the Aragon

En théorie, l’arrivée de cet album Live at the Aragon de Mastodon avait largement de quoi m’émoustiller. Je veux dire, Crack the Skye était un album monstrueux, un joyau noir aux confluents du métal, du rock progressif et du post-rock, un truc de furieux bien comme il faut. En live, ça doit donner.

Après une première, puis une seconde écoute, je me suis remis Crack the Skye dans l’oreille histoire d’être sûr de n’avoir rien raté au film. Cela confirme ma première impression: si je ne doute pas que Mastodon, en live, ça doit donner, en album live, ça donne nettement moins.

Je soupçonne que le problème vient de la musique de Mastodon elle-même: ultra-technique, elle laisse assez peu de place à l’improvisation et, du coup, se retranscrit assez mal dans le cadre d’un enregistrement en public, qui est un domaine où règne souvent l’à peu près et l’improvisation. Quand on est dans la salle, ma foi, l’énergie du groupe doit largement compenser les – petites – maladresses technique, mais calé chez soi dans un fauteuil, ces mêmes peccadilles me font grincer des dents.

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Karnivool : Sound Awake

À l’écoute de ce Sound Awake de Karnivool, je peux d’ors et déjà annoncer que la relève de Tool est assurée. Ceux qui se lamentaient de l’absence de tout nouvel album de la part des Américains depuis 2006 et 10,000 Days peuvent se jeter avec avidité sur cette semi-nouveauté : Karnivool fait plus qu’assimiler l’œuvre de ses maîtres et propose un métal progressif aux ambiances post-rock des mieux ficelé et nettement moins déprimant.

On notera au passage que l’album des Australiens est encore un de ces albums sortis en 2009 et qui auraient pu prétendre au titre d’album de l’année avant qu’Indukti annihile toute compétition dans ce domaine. Décidément, 2009 fut une encore plus grande année musicale que je ne le pensais. Mais revenons à nos moutons, en chair et en viande (si vous me permettez ce jeu de mot acrobatique et capillotracté – et si vous ne me le permettez pas, c’est pareil!).

Pêchu, complexe et maîtrisé, le métal de Karnivool est clairement prévu pour les amateurs exigeants, ceux que les rythmiques binaires et les plans couplet-refrain-pont-solo ennuient au plus haut point. La chose est déjà présente sur le premier morceau, “Simple Boy”, mais il ne faut pas attendre très longtemps pour avoir droit, avec « New Day », à plus de huit minutes construites comme un mécanisme d’horlogerie, dont les faux airs de bluette évoluent rapidement en chaos organisé (oui, c’est un oxymore, mais ce n’est pas le genre de chose qui va arrêter un groupe de ce calibre !).

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Le coup du parapluie: Philosophie, bien-être & crimes passionnels

Reconnaissons qu’il faut au moins être un groupe belge, qui plus est étiqueté à la frontière du post-rock et du prog barré de la tête (et d’au moins dix-sept autres genres musicaux encore plus obscurs) pour oser s’appeler Le coup du parapluie et pour proposer un album intitulé Philosophie, bien-être & crimes passionnels. Histoire de balancer un grand coup, je me permets de pointer un doigt accusateur vers le dernier numéro de Prog-résiste: si j’ai téléchargé ce bidule, c’est tout de leur faute, d’abord!

Cela dit, la filiation avec le rock progressif est des plus ténues et il faut plutôt voir dans le trio guitare-basse-batterie qui compose Le coup du parapluie un groupe de rock alternatif tendance post-rock ou math-rock. De façon générale, c’est une musique qui puise dans plusieurs sous-groupes du rock contemporain, avec des compositions torturées et énergiques et un chant en anglais, malgré des titres parfois en français (et, plus généralement, truffés de jeux de mots foireux et de références à des “séries noires” des années 1960-1970).

Je ne suis pas certain d’être supermégafan de tout l’album; à la longue, il est même un peu répétitif. Mais les ambiances glauques de certains morceaux – aux antipodes du côté délirant des titres et du nom du groupe – comme “La traversée du Desert Eagle”, “The Assassination of Your Beliefs” ou l’instrumental “Le loup dans la bergerie” valent le déplacement.

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Naïve: The End

Appeler son premier album The End, il faut le faire et les Toulousains de Naïve l’ont fait. Ils ont fait bien plus que ça et cet album est un des plus enthousiasmants et originaux que j’ai pu écouter depuis un bon moment – grâce aux bons offices de Progressive Area, qui a visiblement le chic pour dénicher des bidules improbables comme je les aime.

Imaginez un mélange entre du métal progressif à la Tool, du post-métal à la Isis, avec des influences trip-hop, électro et orientales. Oui, il faut avoir une bonne dose d’imagination et le trio qui compose Naïve n’en manque pas, ni d’ailleurs de talent. On passez assez facilement des ambiances contemplatives et atmosphériques à des parties beaucoup plus sombres et plus brutales. Témoin “Underwater”, qui aligne les extrêmes en un seul morceau – certes, de huit minutes, mais c’est un peu la moyenne pour cet album.

De l’intro très métal de “To Lose And To Die For” à l’atmosphérique et planant “The End”, en passant par “The Crying Community”, métal prog hanté par des claviers aériens, les ambiances orientales et la voix féminine de “The Shroud”, ou le décapsulant “Your Own Princess”, il n’y a rien à jeter sur The End et très peu qui mérite un demi-fronçage de sourcil. Les musiciens sont à peu près irréprochables et la production solide.

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Kauan: Aava Tuulen Maa

Allez hop! Une nouvelle fournée d’obscure ambiante atmosphérique bizarre borderline métal venue d’ailleurs avec le groupe russe Kauan et son album Aava Tuulen Maa. Originaire de Chelyabinsk, voici un groupe qui ne dépareillera pas entre Agnost Dei et Fromuz, sinon que sa musique est quand même radicalement différente des deux précédents.

La musique de Kauan est à rapprocher des premiers efforts d’Alcest ou même des parties les plus calmes de groupes comme Agalloch en ce sens que c’est un style à mi-chemin entre le folk et le post-rock. Cela donne concrètement une musique atmosphérique, mélancolique, avec des morceaux plutôt long (un peu moins de dix minutes de moyenne) à la construction complexe, accompagnés de chants éthérés en russe.

De façon générale, l’orchestration des morceaux de Aava Tuulen Maa est en grande partie acoustique, mais avec quelques passages plus électriques, comme dans “Fohn” ou certains passages de “Sokea Sisar”. Avant de se lancer dans cette aventure plutôt folk, Kauan avait un passé métal qui ressort assez nettement par moments, mais ce sont quand même les passages atmosphériques qui dominent, hantés notamment par le violon de Lubov Mushnikova (une des deux membres permanents du groupe, avec Anton Belov aux chants, guitares et claviers).

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Agalloch: Marrow of the Spirit

Sorti un peu furtivement à la fin 2010, Marrow of the Spirit est le nouvel album d’Agalloch, groupe américain dont la musique est aux croisements entre le black-metal, le post-rock et le rock gothique. Si certains critiques parlent de “folk métal”, j’ai personnellement un peu de mal à y trouver beaucoup plus que des accents folk; ce n’est pas Eiluvetie, par exemple.

 

Flyingdeadman: W.e.n

J’ai un petit problème avec W.e.n., le dernier album des post-rockeux belges de Flyingdeadman. C’est du post-rock ambiant, qui rappelle également le rock progressif de Porcupine Tree par certains aspects et qui ne manque pas de qualités musicales, mais qui me paraît très répétitif. Les ambiances s’enchaînent, mais il est parfois difficile de savoir de quel morceau il s’agit et si on est déjà passé au suivant. Et il y a la voix du chanteur, aussi.

En fait, j’ai deux petits problèmes. Enfin, un petit et un gros. Parce que la voix du chanteur est vraiment agaçante. Je connaissais le style screamo, Flyingdeadman semble avoir inventé le style chouino. Et c’est vraiment dommage, parce qu’au niveau instrumental. il y a vraiment des bons trucs. Les ambiances sur des morceaux comme “Sunday 12” ou “Black Sun” sont bien glaçantes, sombre comme il faut, avec juste ce qu’il faut de mélodie; ce dernier morceau comporte d’ailleurs une des rares parties chantées supportables de l’album.

Le problème est que le reste de l’album est nettement moins supportable. Oh, certes, il y a des parties musicales qui ne sont pas inintéressantes (par exemple dans le morceau-titre), mais pour moi, les vocaux sont une incitation à la fuite (ou au crime violent, dans les mauvais jours). À noter que les quatre dernières pistes de l’album sont des remix à l’intérêt oscillant entre l’intéressant (“Sunday 12” par the noein) et l’anecdotique (“Drifiting Alone” par ObHyMon).

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Ef: Mourning Golden Morning

Mourning Golden Morning, du groupe de post-rock suédois Ef, est à rapprocher du dernier album de The Ascent of Everest que j’avais chroniqué il y a peu; ça tombe plutôt bien: tous deux faisaient partie de la sélection de la rédaction de Prog-Résiste pour ce trimestre.

Non sans raison, d’ailleurs: en plus d’être très proches musicalement, avec leur post-rock planant teinté d’orchestration classique (qui me fait également penser au groupe japonais Mono), la qualité est tout autant au rendez-vous de ce Mourning Golden Morning que de From This Vantage.

En grande partie instrumentale (les parties chantées sont présentes, mais rares), la musique de Ef est certes plutôt atmosphérique et planante, comme en témoignent des morceaux comme “Sons of Ghosts” (disponible au téléchargement gratuit sur le site), avec ses violons et sa section cuivre, ou “Alp Lugens And Beyond”.

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The Ascent of Everest: From This Vantage

Un de ces jours, il faudrait que je me penche sur les raisons qui poussent les amateurs de rock progressif à également être intéressés par le post-rock. La raison de cette interrogation vient du fait que l’album From This Vantage de The Ascent of Everest m’a été recommandé par le dernier numéro du prozine belge Prog-résiste. Au reste, ce n’est pas le seul média prog à s’intéresser également à ce genre musical.

Originaire d’un lieu – Nashville, Tennessee – plus connu pour d’autres styles musicaux, The Ascent of Everest propose un post-rock en grande partie instrumental qui emprunte à plusieurs autres courants: world-music à la Peter Gabriel, musiques de film, ambiante atmosphérique à la Sigur Rós. Musique classique, même, avec la présence plus que soutenue (“Safely Caged in Bone”) de violons et violoncelle.

Même si leur musique n’est pas ultra-originale – le post-rock n’est en soi pas ultra-original – la démarche du groupe est impressionnante de maîtrise. Les univers sonores ethniques, classiques et rock se mélangent en un tout très harmonieux, même s’il est sans doute loin d’être facile à appréhender pour le néophyte. C’est de la musique pour mélomane barbu, ça madame! Comme quoi, ça tombe bien. Bref.

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Oceansize: Self Preserved While the Bodies Float Up

Avec un peu d’expérience, le mélomane averti peut assez facilement deviner, d’après le titre de l’album, à quel genre il a à faire. Ainsi, le titre du dernier album d’Oceansize, Self Preserved While the Bodies Float Up, a un sérieux côté post-rock/post-métal de par sa longueur et son thème morbide. On peut avoir des surprises, mais, dans le cas présent, ça tombe assez bien; la pochette aide également pas mal.

Si le groupe anglais a reçu de par le passé de multiples étiquettes, allant du rock progressif au post-rock en passant par le space-rock, cet album est à classer aux côtés de groupes comme Isis, avec cependant une musique beaucoup plus recherchée, plus expérimentale, parfois volontairement déconstruite. En clair, faut s’accrocher, mais Self Preserved While the Bodies Float Up en vaut la peine.

L’influence Isis s’entend assez nettement dans le premier morceau, “Part Cardiac” et, dans une moindre mesure, le suivant “SuperImposer”; par la suite, le groupe explore de multiples approches musicales, souvent en même temps dans un seul morceau. “Build Us a Rocket Then…” est un assez bon exemple: il déboule à grande vitesse et part un peu dans tous les sens; si quelqu’un a bel et bien construit une fusée, c’est avec des bouts de machine à coudre soviétique trouvés dans une décharge.

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Kwoon: When the Flowers Were Singing

Encore un groupe dont le nom et le titre d’album va faire ricaner le cyberpalmipède qui hante ces lieux: Kwoon, dont le dernier album en date s’intitule When the Flowers Were Singing. On peut faire plus obscur, mais ce n’est pas évident. Curieusement, ce n’est pas du rock progressif, même si l’album m’a été recommandé par le dernier numéro de Prog-Résiste.

Kwoon est un groupe français qui fait du post-rock éthéré et minimaliste, nettement inspiré par Sigur Rós. Leur musique est en grande partie instrumentale, mais comporte également quelques partie chantées (mais qu’on entend peu). Si le nom du groupe est inspiré du mot chinois qui est l’équivalent du dojo japonais, en fait d’art martial, on est plus dans le domaine du Taiji pour ancêtres que du Kung-fu. Amis du rythme et de la puissance, passez votre chemin! On est ici dans le domaine de l’onirique évanescent et des ambiances mélancoliques.

Le gros avantage de cet album est que, si on aime le genre, il est parfait. Malgré son “Overture” quelque peu tonitruant, il part très rapidement dans les contrées plus calmes, avec des ambiances à base de nappes de guitare et de violon. Les morceaux ont un petit côté faussement naïf: simples en apparence, mais plus complexes qu’elles n’en ont l’air, avec des mélodies pop couvertes par des atmosphères musicales sur plusieurs niveaux. Mention spéciale à “Ayron Norya”, le plus long morceau de l’album qui est, à mon avis, également le plus réussi.

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Demians: Mute

Donc, hier, c’était convenu. Aujourd’hui, place à l’audace et à Mute, nouvel album de Demians. Derrière ce nom, un Français du nom de Nicolas Chapel qui a décidé de ne pas faire dans le simple. Déjà, son premier album, Building an Empire (que je pensais avoir chroniqué à l’époque, mais qui a dû disparaître dans les limbes de l’intarweb) était du genre bizarre, entre post-rock dépressif, métal progressif énervé et rock progressif mélancolique à la Porcupine Tree.

Mute est tout cela, mais à la puissance dix. Il y a dans cet album des accents d’Anathema, période A Natural Disaster, dans des morceaux comme “Swing of the Airwaves”, “Hesitation Waltz” et “Feel Alive”. On trouve également des inspirations venues en droites ligne de Devin Townsend (riffs lourds et hurlements), comme le déjà cité “Feel Alive”. Il y a également des périodes plus calmes, atmosphériques, comme “Porcelain” et “Black Over Gold”, qui fait suite aux deux précédents. Mélange d’ambiances, certes, mais beaucoup moins hétérogène qu’il n’y paraît.

Paradoxal, mais envoûtant. Demians ose les mélanges, les influences, les atmosphères – avec un certain brio, d’ailleurs, parce que même si certaines juxtapositions sont surprenantes (l’intro orientalisante d’un très métal “Overhead”), il est rare qu’elles tombent à plat. Je ne serais pas hypocrite (et/ou mesquin) au point de dire que c’est un signe que l’originalité paye toujours, mais dans le cas de Mute, elle paye certainement! Tiens, prenez un morceau comme “Tidal” et son intro quasi-pop, qui semble faire un peu tache au milieu de cet album. Paf! En deux minutes, on ressort les grosses guitares et l’orchestration râpeuse et chaotique. Tout l’album est de cet ordre.

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Transit: Whitewater

Le post-rock et moi, c’est un peu la même histoire qu’entre le prog est moi: trop de redites engendrent la lassitude. C’est pourquoi j’accueille avec soulagement et enthousiasme des groupes comme les Belges de Transit et leur album Whitewater. Même si ce n’est pas exactement récent (2008) et que ça semble surtout mort depuis, c’est un petit courant d’air frais dans un milieu musical passablement encombré par les miasmes des copies de copies.

Dans l’absolu, rien ne semble distinguer Transit du groupe de post-rock lambda: musique principalement instrumentale basée sur des ambiances sombres et mélancoliques, nappes de guitares saturées et morceaux plutôt longs – trop parfois, comme les 9’57” de “Thor”, mais parfois pas assez comme pour les 14’10” de “January”. Et puis voilà que commence “No Smoking Gun” avec son faux rythme funèbre et là, on se dit qu’on tient quelque chose de différent.

Bon, “différent”, c’est peut-être un peu exagéré: ça reste du post-rock, même si les sonorités sont un peu différentes. Mais Transit est un de ces groupes qui explorent la frontière – fort poreuse – entre prog et post, notamment dans la construction des morceaux. “No Smoking Gun”, comme “January” plus tard, sont deux exemples de construction en tableaux qui rappelle beaucoup ce qui se fait dans le rock progressif.

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Anathema: We’re Here Because We’re Here

Il est rare que j’attende et que je craigne avec autant de force un album tel que We’re Here Because We’re Here d’Anathema. Il faut dire qu’autant je suis fan de ce groupe anglais, dont le style occupe un espace indéfinissable entre le rock progressif, le post-rock et le métal, voisin de celui que s’est creusé Porcupine Tree et ses affiliés, autant leur précédent album, l’ultra-mou Hindsight, m’avait laissé le souvenir impérissable des catastrophes ferroviaires dont on est le témoin au premier chef.