Il y a des jours où je me dis que faire figure de digital native quand on a 45 ans, face à des gens plus jeunes, c’est vraiment bizarre. Vendredi, j’ai eu la surprise de voir Didier Pègues, un des musiciens du groupe Eye 2 Eye, commenter le billet que j’avais écrit quelques jours auparavant sur leur album After All…

Ce n’est pas tous les jours que j’ai ce genre de retour, dans le cas présent justifié par le fait que j’avais un peu cassé l’album en question. Nous avons eu un échange que j’espère franc sur le contenu et les raisons de ma critique, ce qui est plutôt une bonne chose. Mais ce n’est pas le propos de ce billet.

Ce qui m’a franchement étonné, c’est cette phrase de Didier:

Avant d’acheter ou de mépriser « The Wish », je te propose d’aller l’écouter sur tous les sites de téléchargement illégaux sur lesquels on peut le trouver en tapant « eye 2 eye the wish » sur Google, tu pourras te faire une idée…

Qu’un musicien m’invite directement à télécharger illégalement son album, c’est une première! Mais ce qui me troue particulièrement, c’est que je ne comprends pas du pourquoi le groupe lui-même ne proposerait pas son album en téléchargement gratuit, au format Creative Commons (pour la petite histoire, j’ai fini par l’acheter sur iTunes).

Je veux dire, poussons le raisonnement jusqu’au bout: l’album est en effet présent sur une volée de sites de téléchargement illégal (au moins quatre, rien que sur la première page de recherche Google en question). C’est assez impressionnant quand on pense que, sans vouloir les vexer (une fois de plus), ce n’est pas exactement un grand nom du rock contemporain.

Pour moi, l’approche logique consisterait à proposer carrément l’album moi-même, sur une plateforme tout aussi gratuite, mais que je contrôlerais, ce qui me permettrait d’avoir des statistiques précises de téléchargement (et aussi d’avoir un petit bouton de don qui amènerait quelques sous). Alors certes, After All… est également dispo sur iTunes et sur d’autres plateformes de téléchargement légal, mais rien n’empêche d’avoir, pour ces plateformes, une version “étendue” de l’album, avec un ou deux morceaux en plus, et un livret, par exemple.

Pour moi, cet échange illustre assez bien ce dont j’avais parlé récemment, à savoir l’écart qui existe encore entre l’acceptation de la culture numérique et une approche du bien culturel très XXe siècle. Sans vouloir fâcher personne, je pense que ce serait une bonne idée de changer une fois pour toute d’approche et d’arrêter ce qui ressemble franchement à une attitude schizophrène vis-à-vis d’Internet.

(Photo “POWEr @ HKW” par David Domingo via Flickr sous licence Creative Commons Noncommercial Share-Alike.)

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