L’Autoroute sauvage, tome 1

Petite mise au point liminaire: ce billet va être méchant. Ça m’arrive rarement de chroniquer des choses que je n’ai pas aimées, mais ce premier tome de L’Autoroute sauvage, adaptation en bande dessinée du roman de Julia Verlanger, m’a savaté mes souvenirs de lecture, alors je ne suis pas content.

Pour être très précis, mon état d’esprit oscille entre rage irrationnelle et frustration raisonnée. Il fait vous dire que je considère ce qui était paru alors – chez Fleuve Noir Anticipation et sous le pseudonyme de Gilles Thomas – comme une des meilleures histoires de post-apo que j’ai lue. Alors, certes, c’est du Fleuve Noir Anticipation et je soupçonne que c’était en partie dû au fait qu’il y avait des Suisses, mais bon.

La bande dessinée reprend dans les grandes lignes l’histoire du roman: après une catastrophe qui a anéanti la civilisation, les survivants sont soit des Solitaires – rares, surentraînés – ou des Groupés, pas forcément très doués mais qui se déplacent en masse autour d’un chef plus ou moins taré. Dans cette histoire, un Solitaire rencontre une Groupée et, ensemble, ils vont à Paris pour récupérer un McGuffin.

Sauf que c’est un peu tout ce qu’ils ont gardé: l’île de Porquerolles, d’où vient la fille, n’est plus un sanctuaire dès les premières pages; le Solitaire – qui était le narrateur, dans les romans – n’était pas un géant taciturne et limite benêt et le McGuffin n’était pas une sœur enlevée par des esclavagistes, mais un remède contre une épidémie, cachée au sein d’une ville devenue un cloaque mortel.

Et, surtout, si la catastrophe du roman était une bonne vieille guerre mondiale qui fleurait bon les années septante – sans armes nucléaires, mais avec des cochonneries bactério-chimiques à foison – on a ici une absurdité genre “la Lune a explosé”.

Si déjà l’idée de base est particulièrement foireuse – je crois que même les mangakas n’oseraient plus l’employer – elle est représentée de façon franchement ridicule: on dirait que quelqu’un a peint des morceaux de crêpe dans le ciel.

Mis à part cela, le dessin de Zhang Xiaoyu est correct, avec des décors réalistes souvent très réussis, mais avec un côté asiatique/manga qui est spécialement prononcé sur les personnages féminins et qui est du coup un peu discordant. Pour une autre histoire, je n’aurais rien trouvé à redire, mais là ça me gêne un peu.

C’est vraiment au niveau de l’adaptation que ça coince. J’ai lu, dans la revue promotionnelle Zoo, une interview des auteurs qui expliquent leurs choix. Leurs raisons sont défendables, mais j’ai quand même l’impression que ces décisions laissent au bord de l’autoroute – sauvage – tout ce qui faisait le charme de la série.

Et puis bon, même si quelqu’un comme Laurent Whale prouve que le post-apo “à la Julia Verlanger” a encore une raison d’être, je pense que c’est un genre qui est encore très typé “Guerre froide” et, du coup, garder ce côté “fin 1970” n’aurait pas été plus mal.

Mais c’est peut-être cette putain de nostalgie haïe qui parle, allez savoir. Toujours est-il que, plutôt que de me ruiner les nerfs sur cette adaptation – à mon goût ratée – je vais plutôt relire l’intégrale, publiée il y a quelques années par Bragelonne sous le titre La Terre sauvage.

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4 réflexions au sujet de “L’Autoroute sauvage, tome 1”

  1. A la lacture de cette adaptation, je reprends l’expression de BBS “Ils ont violé ma copine”. Putain, mais non, quoi, la moindre des idées que tu cite dans la réadptation en bédé est juste… absurde/inutile/niaise ?
    Bref… merci infiniment, car ça me titillait d’avoir la bédé, vu que Ben l’Autoroute Sauvage, j’ai adoré, mais maintenant, plus duuuuu tout !

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    • N’exagérons rien.

      Mais bon, c’est vrai que j’ai un peu mal à mes souvenirs de lecture, mais je me méfie aussi de ma tendance à la nostalgie.

      Mes dernières expériences en la matière — Armageddon Rag — me laissent penser que je ne suis pas complètement aux fraises sur ce point, mais on n’est pas à l’abri d’un auto-moubourrage.

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  2. un des rares roman de sf française que j’ai pu relire à 30 ans d’intervalle et, à part le côté un peu machiste années 50, trouvé aussi fort. Petit, les “billes” m’avaient bien plus effrayé que des zombies car, pour moi, plus “réalistes”. Je feuilleterais la bd en magasin pour me rendre compte.

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