Ça faisait longtemps que je n’avais plus acheté un jeu et l’annonce d’une version française de Apocalypse World, de Vincent D. Baker – soutenue par un bombardement publicitaire orbital de la part de son traducteur, Greg Pogorzelski – avait attiré mon attention.

À vrai dire, j’avais déjà acheté la VO du jeu en PDF et j’en avais été passablement déçu. Peut-être le format numérique ou la confusion engendrée par la structure non conventionnelle du bouquin, mais je n’avais rien panné au système et j’avais lâché l’affaire.

Cette version française est plus claire; c’est une bonne nouvelle. En même temps, pour faire plus obscur, il aurait fallu la traduire en klingon et transcrire le tout en tengwar. Elle n’est pas pour autant claire.

Quand je parle de “structure non conventionnelle”, je ne plaisante pas! L’auteur a la fâcheuse idée de balancer des concepts sans les expliquer immédiatement; quand il est gentil, il renvoie à la page où c’est expliqué, généralement quatre chapitres plus loin. Et Vincent Baker n’est pas quelqu’un de gentil.

C’est un des autres points qui me dérangent dans Apocalypse World – oui, parce que, tant qu’à faire, je vais déjà évacuer les choses qui m’agacent, pour commencer. Le MC (maître de cérémonies; c’est le nom du MJ dans le jeu) est censé martyriser les personnages de ses joueurs, leur rendre la vie “intéressante”. C’est un point de vue, mais un que je n’apprécie pas trop.

Le dernier point qui m’a ennuyé, c’est que je suis tombé sur un des bouquins de la première série, dont la reliure a eu du mal à survivre à deux lectures (dont une dans le bus, soit, mais mes livres de poche des années 1970 survivent mieux que ça).

Bon, les trucs négatifs, c’est fait! Passons à ce qui m’a bien plus dans Apocalypse World.

D’une part, il y a l’idée de codifier – parfois à l’extrême – la partie de jeu de rôle, en posant des règles non seulement pour le système de simulation, mais sur le système de jeu en général: que doivent et peuvent faire les joueurs et leurs personnages, que doit et peut faire le MC. J’aime bien, parce que ça permet d’avoir une idée claire de ce qu’est un jeu de rôle, même si on n’a jamais joué.

Ensuite, si les personnages sont définis par cinq caractéristiques/qualificatifs (Cool/Dur/Sexy/Rusé/Zarb) et des actions spéciales dépendant de leur archétype, il n’y a pas réellement de compétences. À la place, il y a des actions de base, comme “Prendre de force”, “Manipuler”, “Agir face au danger” ou “Faire le point”; dans l’idée, toutes les actions que peuvent faire les personnages se réduisent à l’une des huit actions de base.

Il y a quelques subtilités, comme un système de relations et d’expérience assez surprenant, mais pas idiot, plus un système pour gérer le matériel qui colle bien avec le contexte post-apo du jeu de base, mais qui me paraît plus difficile à adapter ailleurs.

Oui, parce qu’à la base, Apocalypse World est un jeu post-apo. Comme son nom l’indique. Cela dit, c’est aussi un système qui est conçu pour des parties qui mettent l’accent sur les actions des personnages et qui demandent explicitement peu de préparation de la part du MC. Si ce dernier prépare des scènes à l’avance, il n’a pas compris le jeu.

C’est une approche que je trouve intéressante – peut-être précisément parce qu’elle va à l’encontre de mes habitudes personnelles, d’ailleurs. Ceux qui ont lu mon précédent article sur la campagne “Devoir de mémoire” pour Tigres Volants voient sans doute où je veux en venir.

Bref, Apocalypse World est un jeu que j’ai trouvé intéressant par ses principes et par ses mécaniques, peut-être même révolutionnaire dans ce qu’il implique dans la manière de jouer. Il est cependant desservi par une forme et une structure pas toujours évidente à comprendre; la VF aurait sans doute mérité une organisation interne remaniée (ou, à tout le moins, plus de références croisées).

Est-ce que j’ai envie d’y jouer? Oui et non. Le post-apo et moi, on n’est plus trop copains et l’approche très “sang et tripes” décrites dans le bouquin ne me fait pas spécialement envie (et, quand bien même, avec ma bande d’excités habituelle, j’aurais rapidement droit à du Robot Chicken Mad Max). Par contre, je m’intéresse fortement à toutes les variantes “apocalypse-powered” et il n’est pas exclu que je me lance sur un autre univers, mais avec le même système.

Pour soutenir Blog à part / Erdorin:

Blog à part est un blog sans publicité. Son contenu est distribué sous licence Creative Commons (CC-BY).

Si vous souhaitez me soutenir, vous pouvez me faire des micro-dons sur Ko-Fi, sur Liberapay ou sur uTip. Je suis également présent sur Patreon et sur KissKissBankBank pour des soutiens sur la longue durée.