L’ordre de lecture n’est au final pas très important; que l’on découvre le Vieux Royaume par l’un ou l’autre des ouvrages, je pense que ça ne change pas grand-chose. Soit on prend l’option “petit bain” et on commence en douceur, par des nouvelles raisonnablement courtes, soit on revient par ce biais dans l’univers jaworskien, par petites touches.
Deux choses m’ont marquées dans cet ouvrage: d’une part, le style de l’auteur. Si on aime les belles tournures, le vocabulaire médiévalisant suranné, c’est un régal. Il y a des descriptions éblouissantes dans ces sept histoires. D’autre part, les histoires en elles-mêmes sont souvent plus que brillantes.
Que ce soit avec “Janua Vera”, le récit d’un psychose, celle d’un roi divinisé qui, arrivé au sommet, perd lentement la raison ou “Le conte de Suzelle”, l’histoire d’une fille de paysans pas comme les autres au destin cruel, on est plongé dans des histoires magnifiques et brutales. J’ai également été impressionné par “Le service des dames”, une geste chevaleresque réaliste et lucide, ou “Un amour dévorant”, un récit de hantise que n’aurait pas renié Carnacki et, dans un registre similaire, “Le confident”.
“Mauvaise donne” est le récit qui introduit don Benvenuto; il est tout à fait dans la veine de Gagner la guerre, mais détonne un peu dans l’ensemble. Également en porte-à-faux, “Jour de guigne” est une hilarante farce qui raconte ce qui peut arriver à un copiste maudit par un palimpseste mal nettoyé. Je suis moins enthousiaste sur “Une offrande très précieuse”, qui est bien écrit, mais dont l’histoire me paraît moins exceptionnelle.
Peu de réserves, donc: Janua Vera est un excellent recueil de nouvelles dans un genre médiéval-fantastique si souvent galvaudé par du sous-Tolkien ou du sous-D&D que l’originalité de ton et de narration dont fait preuve ici l’auteur apparaissent comme une tornade d’air frais. Prenez ça dans la sclérose, les tâcherons!
7 commentaires sur ““Janua Vera”, de Jean-Philippe Jaworski”
Un excellent recueil, en effet. Je garde toujours un souvenir très ému du “Conte de Suzelle”, absolument sublime et terrible à la fois.
J’ai commencé par “Janua Vera” puis, conquis, enchaîné avec “Gagner la Guerre”.
Jaworski est grand !
Bienvenue et tout à fait d’accord.