Thias, Tigres et tête de bois

J’en ai parlé récemment sur mon blog et à l’occasion du défi RPGaDay de cette année, Matthias “Thias” Wiesmann a sans doute été la personne qui a le plus influencé ma façon de voir Tigres Volants – que ce soit l’univers ou le style de jeu. On lui doit “que faites-vous et habillé comment?”, mais pas seulement.

Or, à la suite de mon billet, Thias s’est fendu d’une série d’articles sur son blog, intitulée “Tigres à la retraite” qui revient sur tout ce qu’il a développé pour le jeu. Il y explique comment il en est venu à travailler sur des sujets tels que les Siyani et leurs monnaies absurdes, l’Europe, ses colonies, Ringstadt et Paris, ses diverses campagnes sur Narita ou dans les Comptoirs de Ruïn, ses idées sur les Highlanders et l’Alliance terrienne, ainsi que les Entités.

Tout une foule de créations qui, pour la plupart, se trouvent dans la Tivipédia – même si cette dernière est encore passablement en vrac.

Il y revient aussi sur un sujet plus douloureux sur sa collaboration avec un auteur à grande gueule et tête de bois. Moi, donc.

Le fait est qu’à l’époque où il a écrit le plus clair de ses textes, Thias et moi étions des amis proches, mais s’il y a bien un sujet sur lequel on s’est engueulés plus que de raison, c’est bien Tigres Volants. En fait de tête de bois, l’animal n’est pas mal non plus, mais honnêtement, c’est probablement plus de ma faute que de la sienne.

J’avoue qu’à l’époque, j’étais plus du genre à dire ce que je n’aime pas qu’à formuler ce que j’aimerais. Du coup, un grand nombre de mes réponses aux suggestions de Thias commençaient par “Non”. Et, bien souvent, elles s’arrêtaient là, également. Je n’ai jamais réussi à clairement formuler la direction dans laquelle je voulais voir évoluer l’univers; trop de choses étaient dans ma tête et “hors limite”.

Je suppose qu’aujourd’hui, les choses seraient différentes. Enfin, disons que j’aimerais le croire. J’aimerais penser que ces dernières années, j’ai appris à travailler en groupe, à mieux formuler mes demandes et, surtout, à admettre que, quand c’est publié, ce n’est plus vraiment ni mon jeu, ni mon univers. Si c’est le cas, c’est en grande partie dû à ces expériences pas très heureuses.

Mais, pour être très honnête, je n’en suis pas certain. Tigres Volants – ou Erdorin, pour employer le terme le plus récent – reste encore trop mon univers à moi que j’ai pour que je n’ai pas tendance à surprotéger le bazar.

La morale de cette histoire – une morale en forme de learn from my fail – c’est que, quand on a quelqu’un qui est productif et enthousiaste, ça vaut la peine de mettre son orgueil dans sa poche et de s’asseoir avec cette personne pour voir comment on peut avancer ensemble sans s’étriper parmi.

Je n’ai jamais dit que c’était facile, non plus.

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7 réflexions au sujet de “Thias, Tigres et tête de bois”

  1. Je ne peux que m’incliner bien bas. Tu sais, Alias, c’est en voyant le mal que Thias avait à te proposer des idées que tu puisse exploiter -et en testant moi-même tu dois t’en rappeler- que j’ai pas voulu écrire sur Tigres Volants.
    Il n’est jamais trop tard dans tous les cas, et c’est un mea culpa publique on ne peut plus honorable.
    bon…. maintenant… on aime ton jeu ! Je crois que de la part de Thias, ses partages ont prouvé cette évidence, mais ça coûte rien de le rappeler. “J’aime Tigres Volants. Si j’étais allemande, je voudrais l’envahir”.

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    • Clairement, il y a eu deux problèmes majeurs: 1) moi qui ne veut pas lâcher le contrôle sur le bazar et 2) un manque d’expérience/d’outils pour avoir une collaboration qui fonctionne.

      Les deux s’apprennent, mais il faut du temps. Surtout quand on est une tête de bois.

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  2. Cedric Ferrand avec Watsburg a réussi dans un certains cadre à lâcher sa création. Il faut bien sûr respecter une certaine charte (le ton, l’humour, ….). Résultat la gamme s’enrichit de nombreux suppléments tout en respectant l’univers de l’auteur. Après c’est peut-être plus facile pour Watsburg. Ça me rappelle les environnement open source ou chacun essaye d’enrichir le programme initial en y apportant son domaine de compétence. On arrive a une production très décentralisé et très riche (quand ça ne tourne pas au “Fork”). Merci pour ce billet. Je pense avoir un peu le même problème, arriver à lécher mon univers ou ma création.

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    • Je suppose que c’est aussi le défaut d’avoir un univers qu’on trimbale depuis 35 ans dans sa tête: on s’y attache et il y a énormément de non-dits qui ne font sens que pour soi.

      Wastburg n’a probablement pas tout ce passif, ça aide aussi.

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      • J’expérimente ce phénomène depuis les débuts de Loss. J’ai commencé seule -et très vite, j’ai réalisé que c’était stupide . si je faisais une erreur, qui la verrai ? Avant tout, c’est comme cela que j’ai commencé le travail avec Aly et Emilie… et il a fallu du temps pour que ej lâche la bride. Là, carrément MA ville, de MON univers, que y’a dans le premier tome de mon roman, je la leur donne ! Je leur fournis les bases, les docs qui répondent à leurs questions, la zolie carte que j’ai faite… et c’est entre les mains d’Aly, Emilie et Stéphanie.
        Et en fait, lâcher prise et faire confiance ainsi à mes co-créatrices, même si c’est pas la première fois, est un bonheur !
        Mais oui… c’est pas facile de trouver la bonne méthode, mais aussi la bonne démarche personnelle pour l’accepter.

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  3. Tonton, je vais te contredire en mode “baume sur le coeur”. Quand j’ai bossé pour toi sur l’Ergartis, je n’ai pas du tout senti cette chappe de plomb dont tu parles. Dans mon souvenir, la plupart pour ne pas dire l’immense majorité des remarques que tu as formulées étaient méritées et ont amélioré le texte final. De même, je n’ai pas eu l’impression d’être restreint dans mes apports créatifs.

    Bref, tu as aussi eu des expériences positives, non?

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    • C’est très juste, mais précisément, c’est une expérience qui est venue bien plus tard, après la sortie de TV3. À ce moment, je pense que j’avais commencé à intégrer pas mal des réflexions qui me sont venues après la sortie du livre de base, avec aussi le glissement vers une licence Creative Commons.

      Par comparaison, ce dont parle Thias date de la fin des années 1990.

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