Parfois, j’ai des idées à la con. OK, souvent, j’ai des idées à la con, mais parfois, je me décide à les développer. Là, c’est un peu le plan “si j’avais quelques centaines de millions de d’euros à griller pour faire un film”, eh bien dans ce cas, je referais Métal Hurlant. Ouais, le vieux, celui de 1981.
(Je ne parlerai pas de la récente série télé, je n’ai pas envie de devenir grossier.)
J’avais vu Métal Hurlant à sa sortie – je ne suis même pas certain que j’avais l’âge légal pour entrer dans la salle – et j’avais eu une impression mitigée, genre “OK c’est plutôt cool, mais pas supergénial non plus”. Oui, je pense que je devais dire “supergénial” à l’époque. Je l’ai revu dans l’avion du retour de Namibie et j’ai été déçu.
En fait, non, “déçu” n’est pas le meilleur terme. Soyons honnête: Métal Hurlant version 1981 est moisi.
La version gentille, c’est “il a mal vieilli”; c’est vrai que 1981, ce n’est pas exactement une grande année pour l’animation. Cela dit, ce qui m’a surtout frappé, c’est à quel point il est inégal: niveau technique, il y a des épisodes qui tiennent à peu près la route (“B-17” ou “So Beautiful & So Dangerous”), mais globalement, c’est médiocre avec des grosses pointes de mauvais.
Disons les choses ainsi: il y a dans ce film des scènes grandioses, des idées qui déboîtent et une musique qui, même trente ans plus tard, mord pas mal. Par contre, c’est mal dessiné (surtout par rapport au matériau source), animé avec les coudes et produit par des gens qui étaient nés vieux.
Par exemple: tous les personnages féminins sont des créatures surpulmonnées et se retrouvent en mode “demoiselle en détresse”, à poil ou, le plus souvent, les deux. Je n’ai rien contre la nudité frontale, sauf quand c’est gratuit et ici c’est souvent gratuit.
Sans parler des histoires de fantasy que même les Japonais n’osent plus faire aujourd’hui – mais, pour être tout à fait honnête, les histoires de science-fiction s’en sortent guère mieux.
Alors bon, imaginons que je me retrouve avec 1) les droits du bazar, 2) un budget animation raisonnable et 3) un budget musique solide. Qu’est-ce que je ferais?
Déjà, engager un seul studio d’animation pour faire le bazar; un des intérêts de Métal Hurlant est certes d’avoir repris les styles graphiques de plusieurs illustrateurs phare de l’époque (Corben et Moebius, notamment), mais ce n’est pas une réussite. Il faudrait au minimum garder le même standard de qualité tout du long.
Ensuite, virer la musique symphonique interstitielle. C’est Métal Hurlant, pas Disney Dégoulinant, merde! Ce n’est pas comme si le monde du metal contemporain manquait de talents pour de l’instrumental qui pète.
Et puis étoffer un peu le fil rouge – qui s’avère être une orbe verte, mais passons. Ce serait bien d’avoir une certaine continuité entre les sections. Et, puisqu’on en parle:
Soft Landing
S’il y a bien une scène emblématique de Métal Hurlant, c’est ce générique de folie: la navette spatiale qui glisse en silence, les portes de la soute ventrale qui s’ouvrent et qui dévoilent une Corvette pilotée par un astronaute, qui entre dans l’atmosphère, atterrit en plein désert et démarre sur les chapeaux de roue.
Avec une prod’ au taquet et une bonne grosse musique qui pète – si ça ne tenait qu’à moi, j’irais chercher du God is an Astronaut, mais un bon gros Dream Theater qui tache (i.e pas le dernier) irait aussi très bien – rien à changer.
Grimaldi
C’est la scène où on découvre l’orbe verte qui sert de fil conducteur au fil. C’est cheesy, ce côté “mal absolu”, mais OK, on peut garder. Par contre, il faudrait clairement expliciter l’activation de l’orbe: c’est la fille qui est le déclencheur, l’orbe a utilisé le père pour l’amener jusqu’à elle. Deux répliques pour poser le bazar, basta!
Pas forcément besoin de musique, mais on peut aller chercher dans les instrumentaux doomy, genre STÖMB, Naïve ou carrément The Great Old Ones pour l’ambiance chthulienne.
Harry Canyon
Bon, vous avez tous vu Le Cinquième Élément, vous connaissez la musique – si je puis dire: un New York futuriste et trash, un chauffeur de taxi, une fille mystérieuse, un MacGuffin que tout le monde recherche. Bon, bien entendu, le contexte est un peu différent: on est plus dans un trip noir futuriste.
Avec une ville de New York un peu plus soignée – c’est un des sketchs les plus crapoteux au niveau technique et dessin – une intrigue un chouïa plus solide (les flics ne servent strictement à rien dans l’histoire) et un traitement plus second degré du personnage principal (pensez Bruce Willis) et de l’intrigue, on a quelque chose de tout à fait acceptable.
Pour la bande-son, on peut aller chercher du côté du cybermetal, genre Sybreed ou Crematory, ou le post-métal de Isis ou de Cult of Luna. Ou carrément reprendre les Erkonauts et leur punk-metal progressif.
Den
Là, j’ai un problème: la fantasy goréenne m’agace beaucoup – demandez à Psychée – et l’histoire de Corben tape quand même en plein dedans. C’est dommage, parce que niveau technique, il est correct.
À mon avis, il faudrait considérablement étoffer les rôles féminins – pas au niveau vestimentaire (encore que), mais pour en faire autre chose que des potiches à sauver. Katherine pourrait avoir des informations capitales sur l’orbe et la reine essayerait de jouer double jeu, on pourrait ainsi avoir une intrigue plus copieuse.
Niveau musique, ce n’est pas comme si on manquait de groupes qui font de la musique de gros barbares dénudés. J’aurais presque envie de demander à Nanowar de bricoler un truc, mais si on veut du sérieux, on a Kamelot, Blind Guardian, Sonata Arctica ou les divers Rhapsody qui peuvent faire ça très bien.
Capitaine Sternn
Pour l’histoire, pas grand-chose à redire. Bon, certes, le scénario est grand-guignolesque au possible et le dessin fait un peu tache dans l’ensemble (ça m’a fait penser à du Phil Foglio), mais en prenant en compte le lissage technique et stylistique, ça peut passer crème.
Le décor de la station spatiale est super daté, mais ça se change facilement. On peut éventuellement retravailler un chouïa le personnage-titre pour le rendre un peu moins ridicule, mais c’est mineur.
C’est une séquence qui est littéralement écrite pourtant être mise en musique par Devin Townsend, accept no substitute!
B-17
Un des plus solides segments du film; au niveau du script, rien à redire – sinon peut-être que l’on ne voit pas très bien ce qu’il vient foutre là-dedans. En étoffant un petit peu la scène d’intro, en expliquant que l’orbe a de tout temps été présent pendant les guerres, on doit pouvoir raccrocher les wagons.
Question musique, c’est le moment de dépoussiérer le “Aces High” de Iron Maiden pour la scène d’intro. Bon, c’est un morceau qui est à peine plus récent que le film originel, mais je suis prêt à faire une exception. Sinon, je peux toujours regarder avec Sabaton, qui semble être un groupe spécialisé dans le metal historique (ils ont composé une BO alternative pour Hearts of Iron IV).
So Beautiful & So Dangerous
Cette histoire est une de mes préférées: un grand moment de nawak à grand spectacle dont le principal défaut est, là encore, qu’il manque singulièrement de lien avec le thème principal. Je veux dire, l’orbe réduit à la fonction de bijou pour la secrétaire qui rend fou l’expert? Dafuq?
Si on parte du principe que le vaisseau est là pour récupérer le bijou au nom d’une sorte d’Assemblée galactique qui, à la suite d’un bug administratif, envoie une équipe de pieds nickelés, on a un truc marrant. Et on peut aussi expliquer pourquoi l’orbe est de nouveau perdue après.
Même si j’aime beaucoup le “I Must Be Dreamin'” de Cheap Trick, il est un peu daté et, en remplacement, du Diablo Swing Orchestra, du Unexpect, du 6:33 et/ou du Ozric Tentacles seraient à mon avis de rigueur.
Taarna
Dernier élément (ou presque) du film et qui, en plus, est celui qui lui donne son affiche si iconique, Taarna est aussi un de ceux que je trouve franchement ratés. C’est limite une insulte à Moebius.
Le dessin est moche, avec des couleurs primaires ultrasaturées, l’héroïne a un costume spectaculairement ridicule – en plus du fait qu’elle met une plombe à l’enfiler pour aucune raison autre que boobs – et son oiseau ressemble à un pigeon géant obèse plutôt qu’à un ptérodactyle de guerre pour grandes personnes.
Donc, on a le Mal Élémentaire qui vient corrompre une tribu barbare qui déferle sur la civilisation, patin-couffin. Déjà, je pense qu’on pourrait avoir une scène avec plus de bouche, du genre “Taarna c’est la Guerrière Ultime qui pète tout” en la faisant arriver juste à la fin du siège – pas assez tôt pour empêcher le massacre des dirigeants, mais à temps pour démolir une bonne partie de l’armée du barbare en chef.
Je suggère – pardon: j’exige – également de virer la scène “apportez-moi mon fouet” qui n’a d’autre intérêt que d’émoustiller ceux que ça émoustille. Là encore, c’est pas que c’est sale ou quoi, c’est juste gratuit. Ou alors il essaye vraiment de la briser et à la fin elle le massacre quand même.
Bref, revoir le rythme, revoir l’histoire, revoir le personnage (j’aime beaucoup le fait qu’elle ne parle pas, cela dit). Après, on conjure du Nightwish, de l’Epica ou du Within Temptation et ça fait le job.
On peut garder la conclusion à peu près telle quelle, là encore avec une continuation du thème précédent – là encore, Nightwish ou Tuomas Holopainen devrait faire ça très bien. Si on veut vraiment faire le taquin, on peut même utiliser la marque de Taarna comme symbole récurrent de ceux qui luttent contre lui.
“Le Mal est éloigné pour cette génération est un nouveau combattant naît pour protéger la prochaine”; ça pourrait avoir de la gueule, non?
(Notez que “Alias, arrête de boire!” est une réponse acceptable.)
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Je confirme pour la fantaisie gorréenne et honnêtement, moi aussi, en général, ça me gonfle^^
Dans ma tête, j’ai remplacé Assemblée galactique par CEPMES. Et ça colle bien je trouve.
Par exemple. 🙂
— “On a fait un appel d’offre et c’est la Dame de fer qui l’a gagné.”
— “QUOI???”
— “Ben ils étaient vraiment moins chers que les autres…”
Alias, la drogue c’est mal !
Tu dis ça parce qu’il n’y en avait plus pour toi.
Aussi.
Ça c’est du décryptage et du boulot…C’est vrai que ça “a mal vieilli” mais c’est ce qui le rend culte, dit-on. Comment peut-on regarder ça aujourd’hui au premier degré ou sans la petite nostalgie qui traîne.
Mais on peut aussi se dire que l’on ferait mieux, autrement aujourd’hui. Je n’ai jamais été fan des films à sketches parce que tu en as toujours un ou deux au dessus du lot et le reste moyen ou à jeter. J’ai quelques exceptions en tête mais rares…
Bon, l’industrie de l’animation et du cinéma n’étant pas au top en Suisse ou Namibie, fait que tu ailles très vite sur Cannes. Ça ferme bientôt
C’est une idée pour bloguer, pas forcément une idée pour faire, non plus.
Reprendre le scénario et le dessin, OK, par contre je garderais les chansons (mon côté VCI néophobe qui a usé la cassette de la B.O. dans son autoradio).
La seule entorse que je ferais serait de rajouter Vengeance (The Pact) du Blue Öyster Cult, qui faisait partie d’une série de morceaux qu’ils avaient écrit spécialement pour le film mais qui n’avaient pas été retenus :
Ouéménon, moi je veux du récent, du qui pète!
N’empêche que par ta faute, je me suis réécouté la B.O. tout à l’heure !
J’accepte l’entière responsabilité et je, euh… j’en suis très content. Voilà.
Ah forcément, les commentaires ne prennent pas l’insertion de vidéos, et comme on ne peut pas faire d’aperçu, je me suis fait avoir : https://www.youtube.com/watch?v=o0T8bzaxL14
De toutes façons, un remake de Métal Hurlant, ça existe déjà ! 😉
Il paraît, mais je veux mon mien à moi.